danna -- i need a hug. or six shots of vodka.

whisky a gogo. whisky qui coule à flot. whisky qui s'empare de toi. et te voilà impuissante. dépossédée de tes moyens. de tes facultés cognitives. t'es pas bien, ester. t'es mal. très mal. au point d'avoir trouvé au refuge aux toilettes après ce énième verre de trop. une soirée basique dans cette vie qui est tienne. une soirée de plus. que tu regretteras sans aucun doute le lendemain à cause du mal de tête mais qui ne t'empêchera pas pour autant de recommencer plus tard dans la semaine. rituel devenu tien. alcool qui s'empare de toi. joie un moment retrouvé. avant que ton estomac ne se rappelle à ton beau souvenir et ne te conseille de sympathiser avec la cuvette. t'as bien évidemment fermé la porte derrière toi. unique toilette encore disponible. toilette masculin dans lequel tu as pénétré sans regarder le sigle sur la porte. et déjà on tambourine à la porte. à croire qu'on ne peut pas te laisser deux minutes. dans un dernier élan de motivation, d'envie de rester digne, de fierté a minima, tu sors ce téléphone dernier cri dont tu es propriétaire et tu pianotes quelques lettres. uses quelques touches. dans un sos destiné à danna. un "viens me chercher" qui se perd dans ces mots que tu crées sous l'alcool. message sans queue ni tête. code à déchiffrer. t'envoies le message et tu poses ta tête contre le mur. paroi froide. pas assez pour remettre tes idées en place. et à cette personne qui tambourine comme un sauvage, tu lâches un : d'jà occupé. t'as qu'à tenter la ruelle. ton poing s'abat sur le mur. tu tentes de retrouver une composition normale pour mieux t'effondrer sur le sol. t'es un déchet, ester. et tu espères que danna va comprendre. qu'elle va venir. mais comment pourrait-elle deviner où tu te trouves ?

très souvent tu ignores comment t'en arrives à ce stade-là. celui où tu perds toute dignité. celui où ton manque de confiance transparaît, après avoir été caché derrière des quantités excessives d'alcool et un trop plein d'autres excès en tout genre. sans la famille elitienne, tu ignores où t'en serais. en cellule de dégrisement sans doute. enfermée dans la plus haute chambre de la plus haute tour du château. envoyée au couvent par tes parents. allongée sur ton lit en mode patrick, l'étoile de mer. ou d'autres choses encore moins ragoutante. et c'est dans un ultime effort que tu contactes celle où tu es sûre qu'elle va comprendre ce langage purement esterien. ce langage codé, qu'il faut déchiffrer. ce cerveau imbibé d'alcool qui tente d'appeler à l'aide. petit sos d'une terrienne en détresse.
tu sais pas exactement combien de temps s'est écoulé entre le moment où tu es entrée au whisky à gogo et celui où tu as passé la porte des toilettes pour homme. ni même quand tu as décidé que le sol semblait moins bouger quand tu étais étalée par terre, le front contre la paroi froide. ni quand t'avais réussi à sorti ton téléphone. et encore moins combien de temps danna ferait pour : capter ton sms, le déchiffrer et venir te sauver tel ta jolie chevalière dans son uber blanc (pour la couleur, tu étais disposée à d'éventuels changements, c'était juste une question de choix du proprio, rien qui ne changerait le cours de ton existence, tant que tu ne retapissais pas l'intérieur).
bien enfermée (enfin tu crois que t'as bien fermé le loquet) dans ta tour de crystal carrelages blancs, tu entreprends de les compter. c'est toujours mieux que rien et ça t'évite les éventuels tests d'aptitude pour jurer que non, ester, tu n'es pas bourrée. regarde, ton doigt parvient à toucher ton nez. oh wait ... pourquoi trois doigts tentent d'atteindre ce petit nez ? mais tu replonges bien vite dans tes calculs. et trois. et un. et quatre. carreaux blancs. que tu lâches comme si t'avais trouvé le théorème de pythagore ou piger un truc parce qu'une pomme venait de tomber juste devant toi. mais tu n'avais rien à voir avec newton et autres einstein. tout ce que tu pouvais proposer comme théorie, c'était : combien de shots fallait-il à ester pour qu'elle atterrisse dans un espace de moins de 3m². et à l'aide d'a+b, des logarithmes népériens qui t'avais toujours été inutile à l'achat d'une baguette, tu pouvais facilement estimer que ... passer le 4ème, t'avais cessé de compter. fallait reprendre l'expérience plus tard.
t'en es à ta 3ème hypothèse sur avec qui brenda va finir dans le prochain épisode des feux de l'amour (que t'as jamais regardé mais t'es sûre qu'il y a forcément un personnage qui doit s'appeler brenda et qui doit très certainement être tiraillée entre un brandon et un michael). quand t'entends une voix. enfin pas vraiment une voix. une discussion. ta tête collée contre le mur, t'espères reconnaître celle de danna. mais tu ne comprends que quelques bribes étouffées. et tu crois reconnaître ton prénom au milieu de la discussion. t'as envie de lui faire des grands signes mais à quoi bon, tu t'es enfermée. alors tu prends ton téléphone et sans même avoir composé le moindre numéro, tu te mets à parler : dannaaa. porte grise. carreaux blancs. j'suis là. idée des plus idiotes parce que tu n'avais pas composé le numéro de ton amie, t'avais juste collé ton téléphone contre ton oreille et tu t'étais mise à parler. à croire que malgré tout, un miracle s'était produit : danna te répondait. wait wait what ? tu n'avais peut-être pas fait que boire finalement. danna ?, avais-tu lancé assez fort. t'avais tenté de te redresser en l'entendant parler mais telle une belle sirène échouée rousse, tu t'étais écroulée de tout ton long par terre. j'crois que je suis là. que tu croyais seulement. t'aurais sans doute dû rester dans ton lit. ça t'aurait évité bien des problèmes.